Ecouter les sages

Publié le par BANTOU TIMES le blog de Jean Marie Ntahimpera

Un pays dirigé par des élites sourds-muets va directement vers sa perte, surtout quand ce pays s’appelle le Burundi, qu’il vient de traverser une longue et sanglante guerre civile, qu’il est su le point d’entrer dans une autre encore en gestation, qu’il est le pays le plus corrompu et le plus pauvre de la région.

 

Les dirigeants de ce pays ont décidé de n’écouter personne, de ne rien voir, et surtout de ne rien entendre. Depuis les élections avortées de 2010, la situation politique a dégénéré, et les leaders des partis d’opposition, qui n’ont pas reconnu les résultats de ces élections, ont été contraints à l’exil. Plusieurs voix se sont fait entendre pour réclamer le dialogue avec les forces politiques marginalisées, le pouvoir a fermé les oreilles. Les organisations civiles et internationales ont souligné la montée des assassinats à caractère politique, le pouvoir a fermé les oreilles. Des cas de corruption dans les hautes sphères du pouvoir ont été souligné a plusieurs reprise, le président de la République a répondu par un slogan beau comme le jour, « tolérance zéro », mais préférant ne rien faire. Tous ceux qui ont essayé de donner des conseils aux gouvernants ont été accusés d’avoir des agendas cachés pour le compte des partis d’opposition.

 

Manassé Nzobonimpa, une figure influente du parti au pouvoir CNDD-FDD, membre lui-même du « conseil des sages » de ce parti et membre du parlement de la Communauté est-Africaine, vient d’effectuer une sortie médiatique, ou il dénonce l’existence d une minorité mafieuse a l’intérieur du parti au pouvoir, qui serait prêt a tout pour s’enrichit aux dépens des citoyens. Ce groupe tout-puissant aurait un réseau dans tous les organes du pouvoir, et serait derrière les violations des droits humains dans le pays.

 

Manassé Nzobonimpa a dit ce que tout le monde savait, ce qu’avaient toujours dit les militants de la société civile, mais que personne n’osait dénoncer à l’intérieur du parti au pouvoir. D’ailleurs, son discours n’a pas été bien accueilli à l’intérieur du parti, puisque son porte-parole a menacé de sanctions contre le « sage » qui ose demander le dialogue avec « les bandits armées », et « récupérer la lutte contre la corruption ».

 

Manassé Nzobonimpa risque d’être exclus du parti, il risque de se faire emprisonner, il risque même la vie pour avoir dit la vérité. D’autres avant lui ont subi ce sort, les cas d’Alice Nzomukunda et de Jean-Marie Ngendahayo étant les plus éloquents. Mais il aura au moins le mérite d’avoir montré encore une fois le vrai visage du parti CNDD-FDD, un parti qui se dit démocratique, mais qui n’accepte le débat ni a l’intérieur du parti, ni a l’extérieur, et qui déclare la guerre à tous ceux qui osent dire la vérité qui fâche.

 

Si les dirigeants de Bujumbura sont vraiment engagés dans la lutte contre la corruption, ils devront d’abord nettoyer devant leur porte. Si le parti qui a combattu pour la « défense de la démocratie », il faudra qu’apprenne à écouter les autres et à respecter les règles démocratiques. Si le parti qui régit le destin de plus de 8 millions d’hommes ne peut pas se débarrasser de ses mauvais grains, les citoyens réaliseront un jour qu’ils méritent mieux.

 

Les révolutions en cours dans le monde arabe n’épargneront pas l’Afrique noire si les pratiques obsolètes ne cessent pas dans les enceintes des pouvoirs.

Publié dans politique

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